Cette étude porte sur la culture chansonnière des mouvements de compagnonnages, du XIXe siècle à nos jours. Elle se présente sous la forme d'une vaste enquête inédite, de nature à la fois historique, musicologique et ethnologique : aboutissement de plusieurs années de recherches sur un riche matériau issu d'archives publiques et privées, de collections bibliographiques et muséographiques, d'entretiens ethnographiques.
En opérant une plongée dans la pratique chansonnière des compagnons du Tour de France, ce livre examine ce que «chanter» signifie pour des collectifs de travailleurs manuels, constitués d'individus autodidactes de la musique. La chanson compagnonnique, finement inscrite dans des pratiques sociales propres, y est un art de la profération, un art incarné dont l'identité ne se définit pas tant en fonction de l'ancienneté, des paroles ou du corpus musical de référence.
Ce qui compte avant tout, c'est la participation de cet art au «commun idéal compagnon. Restituer le visage authentique du chansonnier compagnonnique au sens large, c'est étudier l'extériorisation chantée d'une société discrète et mettre au jour un répertoire et des pratiques gui apportent un éclairage inédit sur l'histoire du compagnonnage français. Ces chants, adoptés et transmis de manière privilégiée sur le temps long, ont en effet nourri un imaginaire collectif très dynamique qui constitue, comme le montre la recherche actuelle, un acteur essentiel de l'histoire sociale.